L’image de Paris chez trois écrivains slovènes : Vladimir Levstik, Prežihov Voranc, Lojze Krakar

Par Florence Gacoin-Marks
Publication en ligne le 29 janvier 2015

Résumé

V pričujočem članku avtorica preučuje podobo Pariza oz. Francozov pri treh slovenskih pisateljih, ki so nekaj časa bivali v Parizu med letom 1906 in 1960 (to so Vladimir Levstik, Prežihov Voranc in Lojze Krakar). Ta podoba priča o spremembah, ki jih je francoska prestolnica bila deležna v tem polstoletju, in še bolj o treh različnih pristopih k resničnosti, ki jih zasledimo v delih in drugih pisnih virih slovenskih pisateljev. V vseh treh primerih je bivanje v Parizu pustilo znatne sledove v slovenskem literarnem življenju.

Dans le présent article, nous avons présenté l’image de Paris et, plus généralement, des Français qui ressort des écrits laissés par trois écrivains slovènes (Vladimir Levstik, Prežihov Voranc et Lojze Krakar) ayant séjourné dans la capitale française à trois époques différentes entre 1906 et 1960. L’image proposée par les trois Slovènes témoigne non seulement des changements que Paris a connus durant ce demi-siècle, mais aussi et surtout de trois approches différentes de la réalité. Dans les trois cas, l’expérience parisienne a laissé des traces significatives dans la vie culturelle slovène.

Mots-Clés

Texte intégral

Introduction

1Bien que Paris soit depuis des siècles et, plus particulièrement depuis le XIXe siècle,1 l’une des métropoles européennes les plus attractives pour les élites intellectuelles et artistiques du monde entier, il faut attendre le début du XXe siècle pour que les Slovènes se lancent à l’assaut de la capitale française. Cela est en grande partie dû au fait que ces derniers, partiellement scolarisés en allemand, depuis leur plus jeune âge et ne disposant d’aucune université jusqu’en 1919, ont le plus souvent décidé de faire les études sur le territoire de l’Autriche-Hongrie, plus précisément à Vienne. Cependant, avec le développement du transport ferroviaire et des voyages de manière générale, les habitudes changent et Paris attire de plus en plus d’écrivains, intellectuels et artistes slovènes avides de nouveauté et de liberté. Car, pour les écrivains slovènes venant d’un pays à la population relativement homogène et dont la capitale n’est peuplée que de 43 000 habitants environ en 1900 (113 000 environ en 1950), la capitale française, dont la population tourne durant tout le XXe siècle autour des 2,7 millions et dont le rayonnement culturel sur la scène internationale continue d’être prépondérant, se présente avant tout comme une grande métropole cosmopolite, carrefour des cultures, capitale des arts et des lettres et, à ce titre, grande source d’inspiration tant littéraire qu’artistique.

2Dans les pages suivantes, nous nous proposons de reconstituer l’image de Paris dans les écrits – littéraires ou non – des écrivains slovènes y ayant vécu au moins quelques mois. Pour ce faire, nous nous concentrerons plus spécialement sur l’image de Paris chez trois écrivains pour qui cette expérience a été d’une très grande importance et qui, ayant séjourné à Paris pour des raisons différentes à des époques différentes, permettent de retracer dans les grandes lignes le regard porté par les Slovènes sur la Ville-Lumière entre 1900 et 1970, donc avant le bouleversement culturel gigantesque opéré par la mondialisation à l’aube du XXIe siècle. Ainsi, les regards successifs d’un jeune écrivain bohème en pleine Belle Époque, d’un activiste communiste en exil durant l’entre-deux-guerres et d’un poète bénéficiant d’une bourse d’études dans les années soixante, nous fournissent des images riches et distinctes de la Ville-Lumière qui sont comme les trois volets d’un triptyque. Nous nous efforcerons de transmettre tout le pittoresque de ces regards slovènes sur Paris en illustrant nos remarques de nombreuses citations des écrivains étudiés et, quand cela s’avérera utile, d’autres écrivains slovènes ayant séjourné dans la capitale française2.

1. Vladimir Levstik – Paris, « Babylone de la liberté »

3C’est donc le Paris de la « Belle Époque » que découvre Vladimir Levstik (1886-1957). Ayant coupé les ponts avec sa famille en raison de ses mauvaises relations avec son père très autoritaire et claqué la porte du Premier lycée de Ljubljana, ce tout jeune homme au témpérament rebelle et très doué pour les langues étrangères connaît une période difficile où il commence à traduire la littérature russe en slovène et à écrire ses premiers poèmes et récits3. Ayant en poche les 70 florins que lui avait rapportés la traduction en slovène de Униженные и оскорбленные(Humiliés et offensés) de Dostoïevski, il décide de partir pour Paris où il séjournera six mois en 1906-1907 et presque autant en 1932.  

4Les principaux écrits de Vladimir Levstik nous permettant d’établir sa vision de la capitale française datent tous du séjour de 1907 : son « Pariški dnevnik »  (Journal parisien), manuscrit non publié conservé à la Bibliothèque centrale de Celje (OKC),4 le récit de voyage « V Babilonu svobode » (Dans la babylone de la liberté),5 paru en feuilleton dans la revue littéraire et culturelle Ljubljanski zvon (Le Carillon de Ljubljana) et une longue lettre adressée par le jeune écrivain à son éditeur, conservée à la Bibliothèque nationale et universitaire de Ljubljana (NUK) dans la correspondance reçue par ce dernier (legs Fran Govekar)6. Nous pouvons y ajouter les huit « lettres parisiennes » qui parurent entre le 31 janvier et le 24 avril 1932 dans le quotidien Jutro, même si ces dernières sont moins intéressantes, car l’image de Paris qui s’en dégage n’est plus tout à fait celle d’un étranger. On sent clairement que Levstik se sent chez lui en France comme dans la culture française.

1. 1. Paris, une destination hors du commun, sorte d’« Indija Komandija » ou Pays de Cocagne

5Pour un jeune Slovène pauvre du début du XXe siècle, Paris est une destination inhabituelle et risquée. Pourtant, ce choix semble s’imposer à Vladimir Levstik qui y voit « une terre promise » : contrairement à ses contemporains, plus attirés par le « sud ensoleillé », il « aspire depuis toujours à voir la fière capitale du monde cultivé sur les rives de la Seine, ce Paris dont le roi François Ier [d’Autriche] disait déjà :‘Paris, ce n’est pas une ville, c’est un monde!’».7Plus tard, l’écrivain tirera une grande fierté de sa décision originale pour son époque : « Pour les vieux Slovènes, Paris était une sorte d’Indija Komandija,8 et le garçon qui le voyait à l’âge de vingt ans pouvait être quelque peu fier de lui. »9.

6Les documents dont nous disposons nous permettent de dire que, en dépit de la misère suspendue au-dessus de sa tête comme une épée de Damoclès, Vladimir Levstik se sentait comme chez lui à Paris. Ayant appris le français (comme le russe) en autodidacte avant de partir,10 il semble pour le moins comprendre ce qu’il entend et surtout ce qu’il lit dans la capitale française et traduit déjà des œuvres entières (comme le Tartuffe de Molière et Les Rois en exil d’Alphonse Daudet)11.

7Le jeune écrivain partage son temps entre les écrits qu’il envoie régulièrement en Slovénie pour manger, les musées et monuments, les cours à la Sorbonne et au Collège de France qu’il fréquente en auditeur libre, les soirées dans les lieux de rencontres et de débauche, amassant connaissances et expériences qu’il consigne ensuite dans son « journal parisien », journal intime qu’il rédige régulièrement comme le lui a conseillé le poète Oton Župančič, revenu de Paris peu de temps avant son départ12.

1. 2. Paris, ville des beaux-arts

8Levstik compare donc Paris à Babylone ce qui, sous sa plume, est une image positive, celle d’une ville témoignant d’un haut degré de civilisation et ouvrant ses portes à toutes les cultures de l’Humanité13. Mais c’est aussi – et surtout – l’amour de l’art qui attire le jeune Levstik quand il part pour Paris : « J’étais attiré par ce lieu où les rois, les gouvernements et les mécènes avaient les uns après les autres amoncelé les plus précieuses œuvres d’art de tous les temps dans des musées et galeries si gigantesques que la terre entière n’en connaissait pas de plus riches ? »14.

9Effectivement, toute la suite du feuilleton parisien mensuel proposé par Levstik à la revue Ljubljanski zvon (long d’une cinquantaine de pages) passe en revue tous les tableaux que le jeune écrivain a pu voir à Paris, notamment au Musée du Luxembourg. Ainsi, nous nous arrêtons sur chaque tableau qui donne lieu à une présentation et à des commentaires esthétiques propres à leur auteur. Par exemple, Levstik exprime son admiration pour le « Baiser suprême » de Christophe (ce qui lui donne l’occasion de citer le poème de Leconte de Lisle gravé sur le socle et d’en proposer une très belle traduction slovène en vers de 12/13 syllabes). Par contre, il n’apprécie pas les tableaux de Raffaëlli, qu’il juge tous trop fades, à l’exception de celui représentant Notre-Dame de Paris. Il note, entre autres, que les peintres français, appartenant à un peuple « qui a toujours conservé le greffon classique noble greffé sur sa racine gauloise saine et robuste »,15 sont moins doués pour la peinture sacrée que leurs collègues italiens. Au total, c’est une centaine de tableaux et statues exposés à Paris que le jeune écrivain slovène présente et commente aux lecteurs slovènes de Ljubljanski zvon.

10Notons que Levstik conservera même par la suite cet émerveillement face au bouillonnement culturel caractéristique de Paris. Ainsi, dans la « lettre parisienne » publiée le 18 février 1932, nous lisons que « Paris veut être la métropole de l’esprit. Et, effectivement, c’est ce qu’il semble être ». S’ensuit une évocation enthousiaste des librairies parisiennes : « nulle part ailleurs, un rat de bibliothèque ne réalise avec autant de joie ‘combien il y a de livres dans le monde’ ».16 L’écrivain slovène apprécie surtout la possibilité qui est offerte au passant, lecteur potentiel des livres, de les feuilleter en pleine rue avant de décider s’il va les acheter pour poursuivre sa lecture.

1. 3. Paris, ville des plaisirs charnels

11Que ce soit dans le « journal parisien » ou dans sa lettre adressée à Fran Govekar, Vladimir Levstik n’hésite pas à évoquer, parfois même de manière très explicite, les plaisirs charnels que lui ont apportés les femmes – notamment les prostituées – durant son séjour dans la capitale française. Fortement influencé par la philosophie nietzschéenne très en vogue au début du XXe siècle, Vladimir Levstik n’est pas avare de remarques misogynes, mais fait l’éloge de ces « Madeleines » parisiennes :

Tout particulièrement à Paris, je me mis à penser que, si un jour avant ma mort je commençai à respecter les femmes, ce serait les Madeleines qui m’y conduiraient. Il y a en elles plus d’âme que dans les autres qui ont arpenté toutes les voies ouvertes aux femmes.

C’est un métier, un métier honnête. Nous pouvons vendre tout ce que nous avons et, quand il ne nous reste rien, nous pouvons nous vendre nous-mêmes. Vous vous vendez, vous aussi, vous vous vendez tous. Moi aussi, je me prostitue, nous nous prostituons tous ! Vous vous prostituez et vous n’êtes plus vous-mêmes ; c’est pire qui si une femme vend sa chair et reste malgré tout elle-même. Non, s’il n’y a personne pour dire « pitié pour les filles des rues », c’est moi qui les défendrai ; bon sang, même chez elles je peine parfois à trouver une étincelle d’être humain. Je me réfugie auprès d’elles quand j’ai peur des hommes17.

12Dans un monde où tout le monde se prostitue, la « Madeleine » parisienne reste l’être humain le plus authentique que le jeune homme puisse côtoyer. Dans le Paris de la Belle Époque, Vladimir Levstik ne songe qu’à goûter les plaisirs que ce « métier » lui apporte sans s’intéresser le moins du monde aux questions sociales et morales qu’il pose. Nous verrons que la perception de ce phénomène remarqué et commenté par les trois écrivains changera beaucoup avec le temps.

13Mais le « journal parisien » est avant tout rempli de projets littéraires résumés en quelques lignes, directement inspirés par la capitale français et qui, pour la presque totalité d’entre eux, ne seront pas menés à bien par l’écrivain contraint de traduire d’arrache-pied pour survivre. C’est donc « les méninges pleines de brouillons littéraires » que Levstik quitte Paris au début de l’été 1907. Il aurait voulu rester encore trois ans et passer ensuite quelque temps à Florence ou à Londres,18 mais il n’en eut manifestement pas les moyens. En 1910, il tenta en vain d’obtenir des autorités viennoises une bourse pour Paris. Il lui faudra attendre encore une bonne vingtaine d’années avant de revoir la capitale française en tant que correspondant du quotidien Jutro dont il fut le collaborateur jusqu’à la Seconde guerre mondiale19.

14Le séjour que Vladimir Levstik fit à Paris en 1906-1907 fut déterminant non seulement pour sa future carrière de traducteur de la littérature française, mais aussi pour la constitution de son identité culturelle. Venant d’une région envahie par l’administration autrichienne, Vladimir Levstik achèvera à Paris de définir son identité de slavophile et de francophile. Ainsi, nous lisons dans son « journal parisien » les lignes suivantes : « Je suis le fils du génie slave et le disciple de la culture latine. Pour moi, l’Allemand est un barbare. »20. Il n’est donc pas étonnant  que, aujourd’hui encore, Vladimir Levstik soit surtout connu pour ses nombreuses traductions des littératures russe et française, dont certaines restent toujours inégalées21.

2. Prežihov Voranc – Paris, refuge des communistes yougoslaves en exil

15En raison de ses appels au coup d’État armé et des attentats que ses membres avaient perpétrés contre le pouvoir (notamment l’attentat raté contre le régent Alexandre du 29 juin 1921), le Parti communiste yougoslave fut interdit par une Loi sur la protection de l’État adoptée en août 1921. Il restera illégal jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Pour fuir les persécutions et poursuivre leur activité, les communistes yougoslaves s’exilèrent à l’étranger, notamment à Paris, qui devint l’un des principaux quartiers généraux du Parti communiste yougoslave en exil22.

16C’est ainsi que Lovro Kuhar (1893-1950), plus connu sous son nom de plume Prežihov Voranc, l’un des plus grands prosateurs slovènes du XXe siècle, voyagea à travers l’Europe en tant que représentant du Komintern à partir de 1930 et arriva à Paris au début de l’été 1934 sous la fausse identité de Charles Dubois, commerçant suisse23. Au total, il effectuera trois séjours à Paris : six mois en 1934 et environ deux ans entre 1937 et 1939, période pendant laquelle il se vit confier de nombreuses tâches politiques et participa, entre autres, aux manifestations antifascistes de septembre 1934.24 Ces séjours lui inspireront ensuite deux récits inclus dans le volume « Borba na tujih tleh. Evropski potopisi » [Lutte en terre étrangère. Récits des voyages à travers l’Europe] paru en 1946.25 Le premier, intitulé « Na petem nadstropju » [Au cinquième étage], relate en 14 pages une scène à la préfecture de Paris où le narrateur côtoie la misère des travailleurs immigrés, notamment celle de ses « frères » yougoslaves. Le second récit, intitulé sobrement « Pariz » [Paris] et daté de 1940, dresse en 46 pages un portrait complet de la capitale française et de ses habitants.

17La première remarque qui s’impose est que ces deux récits de voyage sont fortement marqués par les opinions politiques de leur auteur. Lors de son séjour à Paris, le communiste slovène en exil observe et étudie la vie des gens à la lumière de l’idéologie dont il est le défenseur. Ainsi, les somptueux palais et musées parisiens lui rappellent que la France a été et est encore une puissance impérialiste et coloniale26. De même, contrairement à Vladimir Levstik, Prežihov Voranc est loin de goûter aux « plaisirs » qu’offrent les lieux de débauche parisiens et les prostituées qui les fréquentent ; l’écrivain voit dans ce phénomène une nouvelle plaie sociale liée au culte de l’argent gagné par tous les moyens27. Ainsi, à la lecture des deux récits de voyages concernant Paris, on peut relever deux grands pôles dans la présentation que l’écrivain slovène fait de la capitale française : d’une part, les réflexions sur la démocratie française et, d’autre part, le portrait des Parisiens (ou, plus généralement, des Français) déductible des expériences vécues lors des séjours à Paris.

2. 1. Illusions (définitivement) perdues concernant la démocratie française

18Au tout début de son récit intitulé « Pariz », Prežihov Voranc explique que sa représentation de la France avant son départ de Slovénie était faite d’impressions mitigées. Bien qu’ayant déjà son opinion concernant les démocraties que les communistes qualifient de « bourgeoises » (en opposition avec la démocratie « populaire » qu’ils appellent de leurs vœux), l’écrivain slovène était curieux de voir par lui-même un pays hautement recommandé par les communistes de tous pays ainsi que par les Slovènes y vivant après avoir émigré. Au fur et à mesure de ses séjours à Paris, Prežihov Voranc relève les signes lui confirmant les limites de la démocratie « bourgeoise ».

19Le récit « Na petem nadstropju » est entièrement consacré à cette question. Au travers de la destinée des travailleurs immigrés (notamment slovènes), renvoyés des usines pour avoir simplement demandé le respect de leurs droits et chassés ensuite du territoire français par le service de la préfecture chargé de « débarrasser [le pays] des étrangers indésirables » (situé au cinquième étage), l’écrivain pointe du doigt les disfonctionnements d’un système qui, sous couvert de démocratie et de justice, soutient en réalité l’exploitation des immigrés par des « capitalistes » sans scrupules.

20Dans le récit consacré à Paris, il montre que les Parisiens eux-mêmes ont perdu toutes illusions sur les dirigeants de leur pays, qu’ils n’hésitent pas à appeler des « cochons » tout en continuant à les élire. Le militant communiste en conclut que la politique n’est qu’un jeu que les Parisiens continuent de jouer tant que le pouvoir en place ne menace pas l’ordre économique et social existant qui permet à chacun d’essayer de réaliser « l’idéal petit-bourgeois », à savoir « l’enrichissement rapide quels que soient les moyens et les sacrifices nécessaires »28. Prežihov Voranc constate que cet idéal né de la Révolution française (« révolution bourgeoise ») produit un double effet : d’une part, certains Parisiens (notamment les artisans et les commerçants) travaillent plus que dans les autres pays et, d’autre part, la société en général considère les activités immorales – telles que la prostitution – comme des activités économiques à part entière, dont vit « une armada de maquereaux et de prostituées, voire peut-être un million de gens », et que les autorités tolèrent parce qu’elles constituent une véritable industrie au service du tourisme29. Or, pour l’écrivain slovène qui semble très au fait de la vie politique française, on touche là aux limites de la démocratie puisque, en 1936, cette « armada » entretenue par l’immoralité a empêché le Front populaire de réglementer davantage la prostitution dont les conséquences sociales devenaient pourtant de plus en plus préoccupantes30. Notons que l’écrivain dissocie immoralité des « affaires » et immoralité des individus en soulignant ces « plaisirs » immoraux sont essentiellement destinés aux touristes et que « le Parisien ordinaire ne sait rien de ces cochonneries et ne s’y intéresse pas »31.

21Un autre point qui intéresse l’écrivain slovène est la question des rapports entre l’Église et l’État dans une démocratie affirmant haut et fort sa laïcité.

Bien sûr, la France ne connaît pas le cléricalisme politique que nous connaissons dans les pays d’Europe centrale. Généralement, les gens parlent de l’Église, en particulier des prêtres, d’une manière très méprisante, voire bien souvent très injurieuse. Pourtant, ce serait se tromper lourdement que de penser que l’Église n’a aucune influence sur la vie publique à Paris. Son influence est spirituelle, impalpable en apparence, bien qu’elle ait ses entrées dans chaque famille bourgeoise. Toutes ces longues années de laïcisme n’ont pas pu arracher cette influence hors de la sensibilité française32.

22Les rapports qu’entretiennent les Français avec la religion catholique sont donc bien différents de ceux auxquels l’écrivain est habitué en Autriche et en Yougoslavie. Par ailleurs, l’Église française est beaucoup moins rigide et stricte que son homologue centre-européen : « Elle est très souple, elle marche de concert avec le développement et l’esprit de l’époque comme nulle part ailleurs au monde »33. C’est elle qui « s’organise, collecte et amasse des fonds, construit ou achète des maisons ». C’est l’Église qui construit les bâtiments publics que l’État entretient très mal par la suite34. Elle est donc beaucoup plus constructive, au sens propre comme au sens figuré35.

23Enfin, Prežihov Voranc rappelle le statut des femmes françaises depuis l’instauration du Code Napoléon : « L’injustice de la démocratie française à l’égard des femmes est tout à fait criante. La femme française est complétement dépourvue de droits, une esclave au sens propre du terme. »36 L’écrivain slovène est surtout choqué par l’incapacité dans laquelle les femmes sont de disposer de leur argent. Cependant, il ajoute que la femme française « se défend comme elle peut » et établit par ses propres moyens sa place dans la société : « aujourd’hui, c’est elle qui gouverne dans la famille française »37.

2. 2. Contradictions parisiennes (et françaises)

24La première impression ressentie par le communiste slovène à son arrivée à Paris est positive, mais paradoxale : « Paris est grand, vivant, beau et familier. Aussi étrange que cela puisse paraître, c’est la vérité en dépit de tous les contrastes que l’on rencontre. […] On respire un air empesté et étouffant, mais on respire doucement et librement. »38.

25Les Français – et, plus spécialement les Parisiens – ont, eux aussi, leurs contradictions. Ainsi, dès son voyage en direction de Paris, Prežihov Voranc note que leur échelle des valeurs diffère de celles des Allemands ou des Slovènes, ce qui apparaît dans leur conception de la culture générale. Le voyageur slovène s’étonne de ce que son interlocuteur français n’a jamais entendu parler des Slovènes et connaît à peine la Yougoslavie : « À cette époque, malheureux, je ne savais pas que la géographie était pour les Français le concept du savoir humain le plus honni. »39. Et pourtant : « Tout Français est, en général, assez cultivé, en particulier concernant la vie française. Même un élève de l’école primaire sait distinguer avec exactitude quel service à café ou quelle chaise cassée date de l’époque d’Henri IV ou de Louis XIV.»40. Cette passion des Parisiens (et des Français en général) pour les objets anciens continue d’étonner et d’amuser le Slovène tout au long de ses séjours à Paris.

26Les autres traits des Parisiens et, plus généralement, des Français sont les suivants :

27- le Parisien a horreur de l’administration et nourrit une haine particulière envers la police (l’écrivain explique cela comme une réaction inconsciente aux répressions de 1848 et de la Commune);

28- le Parisien est hédoniste : « Le matin, il pense à ce qu’il va manger et boire à midi, l’après-midi, il pense à ce qu’il aura pour dîner »41; il s’ensuit qu’il voue un véritable culte à l’argent sans lequel cette vie de plaisirs est impossible ;

29- « À Paris, l’hygiène n’est pas une nécessité vitale »42 ; l’écrivain étaie cette remarque pouvant sembler relever du stéréotype xénophobe à l’aide de deux anecdotes racontées avec humour ;

30- le Parisien n’aime pas la nature et préfère rester chez lui ;

31- le Parisien est caractérisé par « un certain détachement, un certain conservatisme, une indifférence réellement fataliste à l’égard de tout ce qui n’influe pas de façon déterminante sur son existence » ; pour lui, tout le reste, des choses les plus graves aux plus futiles, sont de la merde »43

32Par ailleurs, l’écrivain slovène tient à tordre le cou à trois préjugés concernant les Français. Selon lui, la tolérance des Français à l’égard des étrangers ne fait que camoufler leur intolérance envers leurs propres minorités nationales : « tous sont Français, et point final »44. Cette remarque montre que l’écrivain slovène, pourtant très lucide sur bien des aspects de la mentalité française, n’a pas compris – ou refuse d’admettre – l’importance du centralisme politique dans la constitution de l’identité française moderne. D’autre part, contrairement aux idées reçues, Prežihov Voranc affirme queles Français sont le peuple le plus discipliné qui soit, mais que cette discipline n’est pas « mécanique, rigide » comme celle des Allemands. De même, selon lui, il est injuste de conclure, en voyant les nombreux lieux de débauche nocturne dont les affaires prospèrent à Paris, que les Français sont immoraux : « Au contraire, la morale des familles françaises est exemplaire, très haute, en vérité incroyablement conservatrice, surannée. »45 Là aussi, l’auteur illustre ces deux derniers éloges du tempérament français à l’aide d’anecdotes tirées de son expérience personnelle.

33Pour finir, au début de la dernière section consacrée aux derniers événements ayant précédé la guerre, Prežihov Voranc conclut que « malgré les contradictions et les désagréments que l’on rencontre, on s’attache rapidement à Paris. Il porte en lui une puissante force à laquelle on s’abandonne sans le vouloir. Cette force est incontestablement l’esprit du Paris historique, la tradition en matière d’amour de la liberté et de démocratie qui s’en dégage à chaque pas. »46.  

34Ainsi, avec son récit de voyage intitulé « Pariz » (« Paris »), Prežihov Voranc propose le texte narratif slovène le plus abouti consacré à la capitale française. Les réflexions politiques et sociologiques – très largement inspirées par l’engagement politique de l’auteur – se succèdent, illustrées par des anecdotes autobiographiques qui donnent vie aux Parisiens sur qui l’écrivain slovène porte un regard clairement bienveillant, en dépit des us et coutumes parfois étranges et contradictoires qui les caractérisent47.

3. Lojze Krakar – Paris, berceau de l’avant-garde poétique

35Contrairement à ce que nous avons vu dans les deux cas précédents, nous savons très peu de choses sur le séjour de Lojze Krakar (1926-1995) à Paris. Par le biais d’un entretien mené en 1991 par son collègue Ciril Zlobec pour la revue littéraire Sodobnost, nous apprenons seulement que le comparatiste et poète slovène a pu séjourner dans la capitale française quelques mois en 1964 à la faveur d’une bourse « plutôt maigre »48. Dans ce même entretien, il décrit en quelques lignes ses activités durant son séjour parisien :

J’ai avant tout parfait ma connaissance de la langue française et lu la littérature française, je suis allé au théâtre presque un soir sur deux, j’ai vu les films de la « nouvelle vague » venus de différents pays, je suis allé plusieurs fois au Louvre, ai fréquenté les expositions de peinture (surtout les impressionnistes et surréalistes français) […], etc.49.

36C’est à peu près tout ce que nous apprenons de factuel, et pourtant son séjour à Paris a inspiré à Lojze Krakar un cycle entier de poèmes, « Ognjemet ob Seni » (Feu d’artifices sur les bords de Seine), premier cycle du recueil « Noč, daljša od upanja » (Une nuit plus longue que l’espoir) paru en 1966, ainsi qu’un poème intitulé « Paris, Bois de Boulogne », paru en 1969 dans la revue Sodobnost avec quatorze autres poèmes.

37Seul cycle de toute la poésie slovène entièrement consacré à Paris, « Ognjemet ob Seni », écrit sur place en 1964, propose une évocation poétique de la capitale française riche en images et impressions diverses. Il comprend un quatrain épigraphe suivi de quatorze poèmes portant les titres suivants : [1] Sur un carte postale envoyée du Sacré-Cœur, [2] Quartier Latin, [3] Les Champs-Élysées, à minuit, [4] L’excursion du samedi, [5] Montmartre, feux de la Saint-Jean, [6] Sous le pont Mirabeau coule la Seine, [7] Le Monde des naïfs, [8] Galerie [sic !] Charpentier, [9] Mon amour, [10] En souvenir de Pigalle, [11] Musée du jeu de paume, [12] Au chien qui fume, [13] Métro Montparnasse-Bienvenüe [sic !], [14] Le 20e anniversaire50.

38De tous ces poèmes se dégagent trois images de Paris récurrentes : celle d’une ville de contrastes, celle d’une ville froide et artificielle et celle d’un carrefour d’innovations esthétiques riche et vivant.

3.1. Une ville de contrastes

39Dès le premier vers du premier poème, Paris se présente comme la « ville de tous les péchés et de toutes les vertus »,51 la ville capable du pire comme du meilleur. Il est intéressant de noter que, comme Prežihov Voranc, Lojze Krakar mentionne le caractère « bon vivant » qui se dégage de la capitale française, « ville qui n’a jamais oublié l’heure de manger ou de se mettre au lit »52.

40L’un des contrastes saisissants est la saleté de la ville en tant que telle et la splendeur des œuvres d’art qu’elle renferme, le contraste entre « la puanteur remontant des canaux et le parfum des baisers émanant des statues de Rodin »53.

41Par ailleurs, le « poète pauvre venu de l’Est », venu d’un pays dont la population est homogène et les contacts avec le continent africain encore très limités,54 semble intrigué par la présence et l’influence des populations noires issues des anciennes colonies, par le contraste entre « les formes venues des galaxies et les habitudes des cannibales »55. La question du colonialisme et du mélange des populations est également abordée dans le deuxième poème, « Quartier Latin ». Ce poème nous a paru suffisamment original pour être cité dans son intégralité :

Une jeune fille noire donne naissance à un fils noir.

Une jeune fille blanche donne naissance à un fils noir.

Dans les rues marche le Christ noir.

Sur l’autel règne la Vierge noire.

Vous êtes devenus noirs, de plus en plus noirs, 

Alors que nous sommes devenus blancs.

Vous êtes venus et vous nous avez appris les calculs blancs

les prières blanches et comment marcher sur les routes

de villes blanches qui ne nous étaient pas destinées.

Vous nous avez dit que nous devions mourir

avec des cœurs blancs si nous voulons rejoindre

le dieu blancs dans la région blanche

où se trouvent les maisons d’éclairs et d’étoiles.

Et nous avons supplié les dieux noirs de nos pères,

nous avons demandé une Vierge noire et un Christ noir

qui comprenne la prière noire

pour le vent bleu.

Maintenant, dans le pays blanc, nous extrayons les graines

d’un grand melon gorgé de soleil.

Et la jeune fille blanche donne naissance à un fils noir,

et la jeune fille noire donne naissance à un fils noir,

et tous ceux qui donnent naissance à des enfant noirs

prient le Christ noir

qui nous précède dans le désert d’asphalte

et nous nourrit chaque jour

avec cinq pains pour satisfaire notre faim

et deux poissons pour étancher notre soif de soleil,

ce soleil qui est seul à être resté blanc56.

42Pour le poète, c’est parce qu’ils ont voulu rendre les noirs blancs que, aujourd’hui, les Parisiens, autrefois blancs, sont de plus en plus nombreux à être noirs. L’image de la Vierge noire, inspirée au poète dans son poème intitulé « Quartier Latin » reprend probablement l’histoire de la Vierge noire de Paris, Notre-Dame de Bonne Délivrance, située en haut de la montagne Sainte-Geneviève avant d’être déplacée après la destruction de son église pendant la Révolution française.

3. 2. Une ville artificielle, un lieu de solitude

43Paris se présente dans un premier temps comme le lieu de tous les contrastes. Cependant, comme le poète l’exprime dans le troisième poème, c’est aussi un lieu qui a perdu son humanité, un lieu froid. Cette impression provient, entre autres, de l’architecture urbaine des années cinquante, où dominent les métaux tels que l’acier57. La vie dans la grande ville, pour laquelle nous avons sacrifié notre environnement naturel, est une vie sur laquelle ce matériau incolore et froid règne en dieu tout-puissant :

Les nuits ont un bruissement d’acier sur les champs asphaltés.

Un coq d’acier réveille les matins printaniers.

Dans des cathédrales d’acier nous prions des Vierges moulées dans de l’acier

Nous habitons des tours d’acier et avec l’acier nous guerroyons

et c’est dans des fours brillants en acier que nous brûlons nos chers parents58.

44Comme il est trop tard pour nous libérer de l’emprise de l’acier sur notre vie, nous ne pouvons plus rien faire à part supplier ce dieu terrifiant de nous laisser mourir dans un environnement plus chaleureux :

laisse-nous mourir à notre façon, comme on le fait chez nous,

d’une façon démodée, si tu veux,

mais pas à ta façon, pas comme l'acier59.

45C’est précisément pour fuir l’acier que le poète, le samedi, aspire à retrouver la nature oubliée, car « plus personne ne connaît le langage du tilleul en fleur, riche en voix parfumées, bleues comme la voix veloutée d’un oiseau mort »60. Mais le répit est de courte durée : « Nous sommes samedi soir et la lune rentre chez elle, derrière les nuages touffus, les tilleuls célestes à la tête ensanglantée. Seule et trompée »61. Cette solitude est celle du poète, triste dans sa chambre, éclairé non par les joyeux feux de la Saint-Jean mais par un « néon tremblotant »62.

46Les rapports humains sont froids, comme en témoigne l’aventure du poète avec une fille de Pigalle. La communication s’avère impossible entre le jeune homme romantique et la prostituée blasée :

Je lui dis : vous êtes jeune et belle.

Elle me répondit : j’ai trente ans.

et je dois vivre vite et travailler de même.

J’aimerais vous acheter des fleurs, dis-je.

Merde, dit-elle, paie-moi une bière.

Mais je vous achèterai quand même des fleurs dimanche.

Le dimanche, dit-elle, je ne travaille pas, je me repose63.

47La femme comprend si peu les sentiments qui animent le jeune homme qu’elle est prise de peur quand il lui déclare son amour :

Et je dis encore : je vous adore, Lina.

Elle me regarda comme si j’étais de la police,

avala la peur qui lui serrait la gorge

et partit par la porte, rapidement, avec un autre64.

48Le poète se retrouve ainsi à nouveau seul et sanglotant, « avec le mensonge » du monde qui l’entoure65.

3. 3. La ville de l’inspiration artistique et poétique

49Cependant, comme nous l’avons déjà noté concernant Vladimir Levstik, Paris est avant tout une ville qui, en tant que sanctuaire des arts, des cultures et des époques les plus différentes, stimule la créativité des artistes étrangers et constitue une grande source d’inspiration.

50C’est dans les musées et les galeries, au fil des tableaux et sculptures exposées, au contact des chefs-d’œuvre de la création humaine, que Lojze Krakar puise images et impressions. Ainsi, trois poèmes sont directement inspirés par la visite de trois musées parisiens : le Musée d’Art Moderne (« Le Monde des naïfs » est le titre d’une exposition proposée par ce musée en 1964), la Galerie Charpentier et le Musée du Jeu de paume. Dans le premier poème, le poète slovène s’étonne – en prenant à témoins les peintres naïfs – du contraste entre l’art naïf, aux couleurs vives, et « le siècle des cieux d’acier », le monde d’après la Seconde guerre mondiale où les constructions en acier se multiplient :

Au siècle des cieux d’acier,

quand, dans les arbres de fer,

au milieu des barbelés,

naîtront des oiseaux de feu66.

51Mais Paris n’est pas seulement une vitrine proposant une large palette de styles différents au regard du touriste avide de connaissances et d’émotions artistiques. C’est aussi un haut lieu de création poétique où se sont développés différents courants d’avant-garde, la « ville des prostituées et des clochards, qui ne cessent d’engendrer sur les bouches de métro poètes et révolutions »67. Tandis que la poésie slovène a connu un renouveau de la poésie lyrique et intimiste (Pesmi štirih - Les Poèmes des quatre, 1953) et que, dans les années soixante, certains poètes cèdent au pessimisme de la poésie de l’absurde (Gregor Strniša, Dane Zajc), Lojze Krakar est attiré par l’absurde ludique du surréalisme. C’est ainsi que, dans le douzième poème du cycle parisien, nous lisons les vers suivants :

Au chien qui fume,

j’ai hier enterré ma maîtresse

avec un végétarien aviné

et un singe parlant.

Au chien qui fume,

j’ai, par une nuit plus longue que l’espoir,

rencontré une fourmi verte

aux grands yeux de chat68.

52Les associations audacieuses se succèdent pour recréer l’atmosphère pittoresque du vieux restaurant parisien et du grand marché des Halles au début des années soixante, soit quelques années après sa disparition. Notons que le poème intitulé « Paris, Bois de Boulogne », publié en 1969, va beaucoup plus loin dans ce sens : aux associations insolites s’ajoutent la suppression de la ponctuation et le mélange des éléments poétiques : « Si vous mélangez les émotions avec de l’essence vous obtenez des poèmes modernes. »69.  Il apparaît clairement que Paris est, pour Krakar comme pour ses prédécesseurs, synonyme de liberté, mais ce n’est plus la liberté de vie et de mœurs du jeune Levstik, ni la liberté d’opinion et d’action politique de Prežihov Voranc ; c’est la liberté créatrice et poétique qui le fascine et l’inspire.

53Dans le sixième poème, le poète slovène glorifie la capitale française, source d’inspiration poétique, dans le giron de laquelle il aurait aimé rester :

Ô, Seine, donne-moi pour femme l’une de tes filles pour que je me sente toujours chez moi dans ta maison.

car je suis hirondelle et ta maison possède un antre sûr pour y construire un nid et un jardin où abondent les vers                                                                                                                             [et les fruits pour mes poèmes70.

54Son souhait n’ayant pas été exaucé, Lojze Krakar a ensuite séjourné plusieurs années à Francfort où il a soutenu sa thèse de doctorat ; ensuite, il est rentré en Slovénie où il a fait une brillante carrière d’universitaire et de poète. Aujourd’hui encore, il reste de son séjour à Paris un « Feu d’artifice sur la Seine », un très beau cycle poétique entièrement inspiré par la capitale française71.   

4. Conclusion

55Dans le présent article, nous avons présenté l’image de Paris et, plus généralement, des Français qui ressort des écrits non littéraires, semi-littéraires et littéraires (journal intime, récits de voyages et poèmes) laissés par trois écrivains slovènes ayant séjourné au moins quelques mois dans la capitale française à trois époques différentes entre 1906 et 1960. Si Paris a changé durant ce demi-siècle, l’image proposée par les trois Slovènes témoigne surtout de trois approches différentes de la réalité. Cela apparaît nettement, notamment, dans l’évocation de la prostitution, thème commun aux trois écrivains : source de rapports humains désinhibés et de plaisirs inégalables pour le jeune écrivain bohême Vladimir Levstik découvrant le Paris de la Belle Époque, la prostitution est envisagée dans sa dimension socio-économique par Prežihov Voranc, communiste en exil réfugié à Paris vers la fin des années 1930 ; enfin, dans les années soixante, le poète Lojze Krakar y voit un signe parmi d’autres de la déshumanisation de l’environnement et des relations humaines.

56Dans les trois cas, l’expérience parisienne a laissé des traces significatives dans la vie culturelle slovène. Amoureux de la langue et de la littérature françaises, Vladimir Levstik consacrera une bonne partie de sa vie à traduire la littérature française en slovène (notamment des romans sur la vie parisienne tels que Bel-Ami de Maupassant ou Illusions perdues et Splendeurs et misères des courtisanes de Balzac) ; quant à ses deux compatriotes, Prežihov Voranc et Lojze Krakar, ils ont chacun à leur manière laissé derrière eux des œuvres originales, récits de voyages et poèmes consacrés à la capitale française, qui comptent parmi les belles pages de la littérature slovène.

Bibliographie

Œuvres littéraires et autres écrits de Vladimir Levstik, Prežihov Voranc et Lojze Krakar :

Krakar, Lojze : Noč, daljša od upanja [Une nuit plus longue que l’espoir], Ljubljana, DZS, 1966.

Krakar, Lojze : « Petnajst pesmi » [Quinze poèmes], Sodobnost, 1969, n° 1, p. 8-9.

Consultable en ligne : http://www.dlib.si/?URN=URN:NBN:SI:DOC-0K15FVWQ

Kuhar, Lovro (Prežihov Voranc) : Zbrano delo [Œuvres complètes], tome 3, Ljubljana, DZS, 1971. Notes de Drago Druškovič.

Kuhar, Lovro (Prežihov Voranc) : Borba na tujih tleh [Lutte en terre étrangère], in : Zbrano delo, tome 9, Ljubljana, DZS, 1973. Notes de Drago Druškovič.

Levstik, Vladimir : « V Babilonu svobode » [Dans la Babylone de la liberté], Ljubljanski zvon, 1907, p. 34-41, 75-79, 157-162, 200-205, 289-296, 549-553, 602-608, 667-672, 745-750.

Consultable en ligne : http://www.dlib.si/details/URN:NBN:SI:DOC-D6FQEZBF

Levstik, Vladimir : « Pariški dnevnik » [Journal parisien], 1906-1907, manuscrit conservé par la Bibliothèque centrale de Celje, Legs Vladimir Levstik, Ms 180.

Levstik, Vladimir : Lettre à Fran Govekar datée du 9 janvier 1907, NUK, Département des manuscrits, legs Fran Govekar, Ms 1011, IV, n° 2.

Levstik, Vladimir : « Kako se naučim tujih jezikov (Nekaj za naše samouke) » [Comment j'apprends les langues étrangères. Quelques mots pour nos autodidactes], in : Jutro, 1926, n° 145, p. 12.

Levstik, Vladimir : [Lettres parisiennes], Jutro, du 31 janvier au 24 avril 1932.

Œuvres littéraires et autres écrits d’autres écrivains slovènes :

Boršnik, Marja : « Srečanja – Pariz v jeseni » [Rencontres - Paris en automne], Naša sodobnost, 1959, p. 63-68, 165-170.

Disponible en ligne : http://www.dlib.si/details/URN:NBN:SI:doc-C4PKKQXD

Kozak, Ferdo : « Pariz » [Paris], Ljubljanski zvon, 1929, pp. 279-285, 335-340, 450-457, 578-583, 722-726.

Consultable en ligne : http://www.dlib.si/?URN=URN:NBN:SI:DOC-LSB8YO1Q

Vidmar, Josip : Obrazi [Visages], Ljubljana, DZS, 1985.

Župančič, Oton : « Ob 120-letnici Ilirskih provinc. Nemška ali francoska kulturna orientacija? » [À l'occasion du 120e anniversaire des Provinces illyriennes. Un orientation culturelle allemande ou française ?], in : Zbrano delo, tome 9, DZS, Ljubljana, 1984.

Bibliographie secondaire :

Drnovšek, Marjan : Slovenski izseljenci in Zahodna Evropa v obdobju prve Jugoslavije [Les émigrés slovènes et l'Europe occidentale au temps de la première Yougoslavie], Ljubljana, ZRC SAZU, 2012.

Druškovič, Drago : Prežihov Voranc. Pisatelj in politik [Prežihov Voranc. L'écrivain et l'homme politique], Celovec/Klagenfurt, Drava, 2005.

Kranjc, Marijan F. : « Lovro Kuhar, agent Kominterne – zveze in delovanje na Primorskem » [Lovro Kuhar, agent du Komintern - Relations et activité dans la région de Primorska].

Consultable en ligne : http://home.amis.net/marijank/dok/Lovro_Kuhar.pdf

Margairaz, Michel : L’État, les finances et l’économie. Histoire d’une conversion 1932-1952, chapitre VII : « Le programme de Front populaire et ses trois lectures », Institut de la gestion publique et du développement économique, 1991, pp. 201-228.

Consultable en ligne : http://books.openedition.org/igpde/2293

Moulinier, Pierre : Les étudiants étrangers à Paris au XIXe siècle. Migrations et formation des élites, Rennes, P.U.R., 2012.

Smolej, Tone : « Anton Ocvirk (1907-1980). Contribution à l’étude de la fondation et du développement de la littérature comparée en Slovénie », Revue de littérature comparée, 2006, n° 3, pp. 351-364.

Šepetavc, Anton : Pisatelj Vladimir Levstik v prvem desetletju 20. stoletja [L'écrivain Vladimir Levstik durant la première décennie du XXe siècle], mémoire de D.E.A., Département des études slovènes, Faculté des lettres, Ljubljana, 2000.

Zlobec, Ciril : « Intervju Sodobnosti: Lojze Krakar » [L'interview de la revue Sodobnost : Lojze Krakar], Sodobnost, 1991, n° 11.

Consultable en ligne :http://www.dlib.si/?URN=URN:NBN:SI:doc-3XQI5NIZ

Notes

1  À ce sujet, lire l’ouvrage de Pierre Moulinier sur l’internationalisation des universités parisiennes au XIXe siècle (Les étudiants étrangers à Paris au XIXe siècle. Migrations et formation des élites, Rennes, P.U.R., 2012).

2  Toutes les citations extraites des textes slovènes sont traduites par l’auteur du présent article.

3  Nous reprenons ici les données biographiques présentées par Anton Šepetavc dans son mémoire de magistère intitulé Pisatelj Vladimir Levstik v prvem desetletju 20. stoletja (L’écrivain Vladimir Levstik durant la première décennie du XXe siècle, voir la bibliographie). Le chercheur a repris, vérifié et complété les données antérieurement disponibles, fournissant ainsi une description détaillée de la jeunesse de l’écrivain.

4  Vladimir Levstik, « Pariški dnevnik », 1906-1907, manuscrit conservé par la Bibliothèque centrale de Celje, Legs Vladimir Levstik, Ms 180.

5  Vladimir Levstik « V Babilonu svobode », Ljubljanski zvon, 1907, p. 34-41, 75-79, 157-162, 200-205, 289-296, 549-553, 602-608, 667-672, 745-750.

6  Lettre de Vladimir Levstik à Fran Govekar datée du 9 janvier 1907, NUK, Département des manuscrits, legs Fran Govekar, Ms 1011, IV, n° 2.

7  Vladimir Levstik « V Babilonu svobode », op. cit., p. 34.

8  « Indija Komandija » est un pays imaginaire tiré d’un conte populaire de l’ouest de la Slovénie. C’est une sorte de terre promise, l’équivalent slovène de ce qu’est le « Pays de Cocagne » chez certains peuples d’Europe occidentale.

9  Vladimir Levstik : « Kako sem postal oče » (Comment je suis devenu père), Jutro, 10 février 1929.

10  Dans son article intitulé « Comment j’apprends les langues étrangères (Quelques idées pour nos autodidactes) », daté de 1929, Vladimir Levstik explique avoir appris le français avec la méthode allemande des éditions Langenscheidt (il n’y avait alors aucune méthode slovène pour autodidactes) ; il se plaint du peu d’efficacité de cette méthode pour l’apprentissage de la communication orale (Levstik, Vladimir : « Kako se naučim tujih jezikov ? (Nekaj za naše samouke) », in : Jutro, 1926, n° 145, p. 12).

11  Le premier manuscrit – malheureusement incomplet (le rôle de Dorine a été perdu) – est conservé au Musée du Théâtre de Ljubljana ; le second, proposé à la publication par le jeune traducteur dans sa lettre à son éditeur, a vraisemblablement été détruit par les Allemands pendant la Seconde guerre mondiale.

12  Vladimir Levstik, « Pariški dnevnik ». Ce journal, fait de notes fragmentaires et éparses griffonnées d’une écriture parfois difficilement lisible, commence le 3 janvier 1907 et s’achève le 10 mai de la même année.

13  Dans sa tribune intitulée « Pariz » (Paris), publiée dans la revue littéraire Ljubljanski zvon en 1929, Juž Kozak reprend cette même métaphore de « Babylone », mais dans le sens négatif qu’il prend souvent ; constatant que Paris est devenu le « lieu de rassemblement de tous les peuples et de toutes les races qui ont naturellement déjà laissé leur empreinte sur son visage », l’intellectuel se demande si la ville n’a pas perdu une partie de son identité historique et ne risque pas de le regretter (p. 284).

14  Vladimir Levstik, « V Babilonu svobode », op. cit., p. 34.

15  Ibid., p. 161.

16  Vladimir Levstik, « Pariško pismo », Jutro, 18 février 1932.

17  Vladimir Levstik, « Pariški dnevnik ».

18  Nous l’apprenons dans la lettre à Fran Govekar du 9 janvier 1907 déjà mentionnée.

19  C’est à cette occasion qu’il put retrouver pour quelques années son vieil ami français Albert Algoud, installé à Paris avec sa famille, notamment avec son fils Philippe, dont Levstik était le parrain. Albert Algoud et Vladimir Levstik s’étaient connus en 1911 à Ljubljana, quand le jeune Français avait quitté la France pour ouvrir une école de français dans cette partie de l’Autriche-Hongrie. Bien qu’Albert Algoud ait dû quitter le territoire autrichien au début de la Première guerre mondiale, les deux hommes sont toujours restés en contact épistolaire (la dernière lettre de Levstik à Algoud date de quelques jours avant sa mort).

20  « Pariški dnevnik », op. cit. En cela, Vladimir Levstik diffère de son rival Oton Župančič qui, dans un article consacré au 120e anniversaire des Provinces illyriennes, déclare : « J’aime les Français, mais ne déteste pas les Allemands. Jusqu’à présent, nous avons regardé avec un seul œil. Ouvrons le second et usons des deux pour regarder [le monde] » (Oton Župančič, « Ob 120-letnici Ilirskih provinc, Nemška ali francoska kulturna orientacija? », in : Zbrano delo, tome 9, DZS, Ljubljana, 1984, p. 38).

21  Parmi les représentants ou contemporains de la « Moderna » slovène ayant séjourné à Paris, mentionnons l’historien de la littérature et de la culture Ivan Prijatelj (1904), le poète et traducteur Oton Župančič (1905), l’écrivain Anton Novačan (1910), le poète et traducteur Anton Debeljak (1912).

22  Marjan Drnovšek, Slovenski izseljenci in Zahodna Evropa v obdobju prve Jugoslavije [Les émigrés slovènes et l’Europe occidentale à l’époque de la première Yougoslavie], Ljubljana, ZRC SAZU, 2012, p. 21.

23  Marijan F. Kranjc, « Lovro Kuhar, agent Kominterne – zveze in delovanje na Primorskem », p. 6. De son côté, Druškovič mentionne que l’écrivain slovène aurait séjourné 31 bis, rue Charles Fourier, dans le 13e arrondissement.

24  Pour le récit détaillé des activités de Prežihov Voranc à Paris, lire : Drago Druškovič : Prežihov Voranc. Pisatelj in politik, Celovec/Klagenfurt, Drava, 200, pp. 198-209, 238-266. Si les nombreuses tâches politiques qui lui étaient confiées l’empêchaient de se consacrer à l’écriture, elles lui laissaient tout de même assez de temps pour apprendre le français (il pouvait s’exprimer assez aisément à l’oral) et lire, notamment les grandes œuvres de la littérature française. Druškovič mentionne quelques auteurs que l’écrivain aurait lus durant ses séjours à Paris : « Dumas, Balzac, Zola, Stendhal, Diderot, Giono pour les plus jeunes (voir : Prežihov Voranc, Borba na tujih tleh, in : Zbrano delo, tome 9, Ljubljana, DZS, 1973, p. 695).

25  Ce volume comprend huit récits, dont trois concernent la France : « Na petem nadstropju » (Au cinquième étage ;  sur l’administration française), « Semenj belih ljudi » (La foire aux hommes blancs ; sur l’esclavage moderne en France dans les années 1930) et « Pariz » (Paris, sur la capitale française).

26  Prežihov Voranc, Borba na tujih tleh, op. cit., pp. 322-323.

27  Ibid., pp. 321-322. Certaines réflexions sont vraisemblablement au moins partiellement inspirées par des articles parus dans la presse communiste, notamment dans L’Humanité (par exemple, la référence aux « deux cents familles » détenant le capital reprend une idée souvent exprimée par Jacques Duclos et reprise par l’organe du PCF le 26 juin 1936.

28  Ibid., p. 321.

29  Ibid., pp. 321-322.

30  Effectivement, en 1936, le Ministre de la Santé de l’époque avait voulu déposer un projet de loi mettant fin aux maisons closes et instaurant un délit de contamination pour les clients atteints de maladies vénériennes. Ce projet avait échoué sous la pression de collectifs populaires.

31  Prežihov Voranc, Borba na tujih tleh, op. cit., p. 332.

32 Ibid., p. 323-324.

33 Ibid., p. 325.

34 Ibid. p. 324.

35  Ce passage confirme ce qui apparaît déjà clairement dans le roman Jamnica (1945) : contrairement à de nombreux écrivains communistes, Prežihov Voranc, dont le frère cadet était prêtre, n’est pas un anticlérical acharné.

36  Prežihov Voranc, Borba na tujih tleh, op. cit., p. 331.

37  Ibid.

38 Ibid., p. 314.

39 Ibid., p. 308.

40 Ibid.

41 Ibid., p. 327.

42 Ibid., pp. 328-329.

43 Ibid., pp. 329-330

44 Ibid., p. 331.

45 Ibid., p. 332

46 Ibid., p. 333.

47  Parmi les autres communistes slovènes ayant séjourné à Paris pendant cette époque, il convient de mentionner le juriste et co-fondateur du Parti communiste slovène Boris Kidrič, l’écrivain Ciril Kosmač ainsi que des professionnels de la politique, notamment Anton Ukmar et Janez Titan.

48  Nous sommes beaucoup mieux informés des études suivies à la Sorbonne en 1931-1933 par le fondateur de la littérature comparée slovène, Anton Ocvirk (à ce sujet, lire l’article de Tone Smolej paru dans la Revue de la littérature comparée).

49  Ciril Zlobec, « Intervju Sodobnosti: Lojze Krakar », Sodobnost, 1991, n° 11, p. 1000.

50  Les titres en italique sont en français dans l’œuvre originale.

51  Lojze Krakar, Noč, daljša od upanja, Ljubljana, DZS, 1966, p. 9.

52  Ibid.

53  Ibid.

54  En 1964, le « Mouvement des non-alignés », créé à l’initiative de la Yougoslavie, n’existe que depuis trois ans. Il faudra attendre le début des années soixante-dix pour voir se développer de manière significative les échanges étudiants entre la Slovénie et les pays africains.

55  Lojze Krakar, Noč, daljša od upanja, op. cit., p. 9.

56  Ibid., p. 10-11.

57  Notons que, quelques années plus tôt, Marja Boršnik déplore le manque de couleurs dans les rues, sur les immeubles et même dans la mode. Elle se demande si, parée de quelques bâtiments plus colorés comme l’a été la petite ville côtière slovène de Piran, la capitale française sortirait de son statisme et retrouverait sa vitalité. Car, pour l’intellectuelle slovène (et c’est sur cette constation que s’achève son récit), le cosmopolitisme vivifiant de Paris se perd dans la grisaille, « toute cette vie en noir et blanc crucifie Paris, ville porteuse de nouveaux courants, ce merveilleux et libre Paris qui reflète et féconde tout ce qui est étranger » (voir : « Srečanja – Pariz v jeseni », Naša sodobnost, 1959, p. 170).

58  Lojze Krakar, Noč, daljša od upanja, op. cit., p. 12.

59 Ibid.

60 Ibid., p. 13.

61 Ibid.

62 Ibid., p. 15.

63 Ibid., p. 20.

64 Ibid.

65 Ibid.

66 Ibid., p. 17.

67 Ibid., p. 9.

68 Ibid., p. 22.

69  Lojze Krakar, « Petnajst pesmi », Sodobnost, 1969, n° 1, p. 9. Il a été impossible d’identifier quelle représentation du Théâtre des Nations (Théâtre de l’Odéon) a inspiré ce poème semblant se référer à une pièce de théâtre précise (probablement apparentée au théâtre de l’absurde).

70  Lojze Krakar, Noč, daljša od upanja, op. cit., p. 16.

71  Parmi les poètes slovènes ayant écrit au moins un poème sur Paris, mentionnons Oton Župančič, Janez Menart, Edvard Kocbek, Kajetan Kovič et Peter Semolič.

Pour citer ce document

Par Florence Gacoin-Marks, «L’image de Paris chez trois écrivains slovènes : Vladimir Levstik, Prežihov Voranc, Lojze Krakar», Revue du Centre Européen d'Etudes Slaves [En ligne], Numéro 4, La revue, Imaginaire littéraire franco-slave, mis à jour le : 23/11/2021, URL : https://etudesslaves.edel.univ-poitiers.fr:443/etudesslaves/index.php?id=889.

Quelques mots à propos de :  Florence Gacoin-Marks

Florence Gacoin-Marks est maître de conférences de littératures française et francophones à la Faculté des lettres de Ljubljana (Slovénie). Elle est l’auteur d’une thèse en littérature comparée sur le roman réaliste slovène de l’entre-deux-guerres dans le contexte européen, soutenue en Sorbonne en 2005. Ses principaux domaines de recherche sont les littératures françaises et francophones, les relations littéraires franco-slovènes et la traductologie. Dernières publications :
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