Barrières à la créativité dans l’apprentissage des langues étrangères et moyens de remédiation  

Par Maciej Smuk
Publication en ligne le 06 mars 2017

Résumé

The main objective of this article is to examine the different barriers to creativity in the context of learning foreign languages. To understand their origins, the links between the so-called creative behavior and some individual variables that are part of knowing how to be a learner are here explained. The question of self-esteem, language anxiety, intelligences, cognitive styles, learning strategies, personality factors and beliefs about languages ​​will be raised on the occasion of a reflection on four types of barriers: affective, cognitive, personality-related, socio-psychological. Some recommendations and remedial educational activities will be offered at the end of the article.

L’objectif principal du présent article est d’examiner les différentes barrières à la créativité dans le contexte de l’apprentissage des langues étrangères. Afin de comprendre leurs origines seront explicités les liens entre les comportements dits créatifs et certaines variables individuelles qui font partie du savoir-être d’un apprenant. La question de l’estime de soi, de l’anxiété langagière, des intelligences, des styles cognitifs, des stratégies d’apprentissage, des facteurs de la personnalité et des croyances sur les langues sera soulevée à l’occasion d’une réflexion sur quatre types de barrières : affectives, cognitives, liées à la personnalité, sociopsychologiques. Quelques recommandations et activités pédagogiques de remédiation seront proposées vers la fin de l’article.

Mots-Clés

Texte intégral

INTRODUCTION

1« La créativité est bien une qualité commune à tous, mais elle n’est pas mise en œuvre par tous et tout le temps de la même façon » (Sagaz, 2006 : 46), et ce sont surtout les diverses variables individuelles non langagières qui en endossent la responsabilité. Encore certaines d’entre elles peuvent-elles inhiber les comportements dits créatifs, voire les dégrader – c’est dans ce contexte que l’on recourt au vocable de « barrière ». Le but principal poursuivi dans cet article est d’analyser les sources de barrières à la créativité dans l’apprentissage des langues étrangères.

2Dans un premier temps, nous rappellerons la définition du terme de « savoir-être » qui a été introduit dans le Cadre européen commun de référence pour les langues (dorénavant Cadre européen). Nous évoquerons ultérieurement les caractéristiques-clés d’un apprenant qualifié de créatif, ce qui nous semble absolument nécessaire du point de vue de la suite de l’article – tout au long de l’analyse, cette description constituera un point de repère et nous permettra de voir combien de variables individuelles, composantes du savoir-être, influencent ou conditionnent les comportements créatifs. Puis, nous partagerons une réflexion sur la spécificité de diverses barrières à la créativité dont nous avons discerné quatre types : barrières affectives, barrières cognitives, « pseudo-barrières » liées à la personnalité et barrières sociopsychologiques. Chacune des quatre catégories sera discutée en détails et illustrée d’exemples de variables qui y appartiennent. Pour terminer, nous aborderons également la question des moyens de dissiper certaines barrières ou d’atténuer leurs conséquences afin de stimuler la créativité langagière d’un apprenant.

1. SAVOIR-ETRE D’UN APPRENANT SELON LE CADRE EUROPEEN

3L’impact des variables individuelles non langagières, qualifiées habituellement de traits de la personnalité, sur l’apprentissage des langues étrangères est soulevé dans la littérature didactique dès les années 1970 et surtout depuis l’avènement de l’approche communicative (p. ex. Caré, 1976 ; Debyser, 1976 ; Fontier, Le Cunff, 1976 ; Debyser, 1977). Mais c’est seulement trente ans plus tard, en 2001, que le terme de « savoir-être » (existential competence) apparaît dans le Cadre européen. Le savoir-être est considéré comme une compétence d’un apprenant en langue et, à côté du savoir, du savoir-faire et du savoir-apprendre, il fait partie des compétences générales (general competences). Selon cette interprétation, le savoir-être englobe :

4-les traits de la personnalité (extraversion/introversion, optimisme/pessimisme, etc.);

5-les croyances (relevant du domaine religieux, idéologique, etc.) ;

6-les valeurs (morales, sociales, etc.) ;

7-les inclinations cognitives quant au traitement des données (styles cognitifs, stratégies d’apprentissage préférées, etc.) ;

8-les attitudes (ouverture à la différence, aptitude à prendre ses distances par rapport aux stéréotypes, etc.) ;

9-les motivations (externes/internes, instrumentales/intégratives, etc.) ;

10-les avis sur différents sujets abordés lors des cours de langue.

11D’une part, tous ces ingrédients agissent sur la manière d’apprendre les langues étrangères ; d’autre part, l’apprentissage des langues provoque leur développement :  

Dans une approche interculturelle, un objectif essentiel de l’enseignement des langues est de favoriser le développement harmonieux de la personnalité de l’apprenant et de son identité en réponse à l’expérience enrichissante de l’altérité en matière de langue et de culture. Il revient aux enseignants et aux apprenants eux-mêmes de construire une personnalité saine et équilibrée à partir des éléments variés qui la composeront (Cadre européen, 2001 : 9).  

12La plupart des variables individuelles sont sujettes à des variations, mais quelques-unes se caractérisent par une relative stabilité et la résistance aux modifications – il est surtout question des facteurs de la personnalité, tels que l’extraversion et l’introversion ou le neuroticisme et la stabilité émotionnelle, étant enracinés dans la biologie, spécialement dans les mécanismes biochimiques, neurologiques et physiologiques. Comme le remarque Deyrich (2007 : 47), les composantes du savoir-être d’un apprenant forment son identité, aussi bien sur le plan individuel, donc psychique, que sur le plan collectif, soit culturel et social. Il faut ici mettre en exergue les relations de dépendance entre l’individuel et le collectif, car elles expliquent de nombreux comportements d’un apprenant :

[…] certaines cultures constituent pour son développement un point de soutien considérable (social, psychologique, moral, etc.), alors que d’autres sont à l’origine de sérieux blocages à caractère psychosocial ; c’est par exemple le cas de celles qui rejettent l’affectivité, qui tendent à l’uniformisation idéologique ou encore de celles qui soutiennent une hiérarchisation poussée des contacts (Smuk, 2012a : 29).

13Il s’ensuit que les comportements créatifs, eux aussi, dépendent non seulement de telle ou telle configuration de traits individuels. Leur présence et leur forme (par exemple le degré d’originalité) restent sous l’influence des habitus et des attentes propres à un pays, à un milieu culturel ou à un contexte social donné.

2. CREATIVITE AU SEIN DU SAVOIR-ETRE

14Comme nous l’avons vu, le savoir-être d’un apprenant enserre de nombreuses variables individuelles. Mais ce qui peut étonner, du moins au premier examen, c’est que le terme de « créativité » n’est pas évoqué dans le Cadre européen, bien que dans sa section 5.1.3, intitulée « Savoir-être », soit inventoriée au moins une vingtaine de différents traits individuels d’un apprenant qui influent sur son apprentissage des langues étrangères. On trouve, certes, sur cette liste les variables fortement rattachées à la créativité (esprit d’entreprise, souplesse, ouverture d’esprit, intelligence, confiance en soi, etc.), mais le mot de « créativité » tel quel n’est pas mentionné.

15L’explication de cette lacune est probablement liée à la nature même de la créativité, celle-ci étant un concept tissé de composantes multiples et disparates. C’est trop peu de dire que la créativité est en rapport avec de nombreuses variables individuelles ; en effet, elle est enracinée dans celles-ci. D’un point de vue pratique, ceci signifie que telles ou telles caractéristiques individuelles d’un apprenant conditionnent (donc pas seulement influencent) les comportements créatifs. D’après Sternberg (2002 : 29), les facteurs suivants y jouent leur rôle : l’ensemble des connaissances préalables (knowledge), les styles de pensée employés le plus souvent, la personnalité, les motivations, les conditions externes.

16Passer en revue les traits d’un apprenant créatif fait prendre conscience du rôle influent de différentes variables individuelles. Rappelons ces caractéristiques-clés de façon synthétique pour pouvoir y recourir dans la suite de l’article (Runco, 2004 ; Aden, Piccardo, 2009 ; Huteau, 2013). Nous les avons regroupées en vingt ensembles :

17- Un tel apprenant s’intéresse aux questions complexes.

18- D’habitude, il montre son intérêt pour la nouveauté.

19- Il se caractérise par une grande tolérance à l’inconnu, à l’inattendu et à l’ambiguïté.

20- Il est enclin à éviter la routine.

21- Dans de nombreuses tâches, il éprouve le besoin de sortir des sentiers battus et d’expérimenter.

22- Il ne craint pas de prendre des risques dans la recherche de la solution des problèmes.

23- Il fait preuve d’une grande souplesse quant au traitement des données, qui se manifeste surtout par la pensée divergente et le processus conceptuel ouvert.

24- Il est apte à penser abstraitement.

25- Son imagination est très productive.

26- En résolvant des problèmes, il a recours à l’intuition.

27- Il possède une grande facilité à effectuer un raisonnement inductif, c’est-à-dire partir de faits particuliers pour en tirer une conclusion générale.

28- Ses travaux se distinguent par leur degré d’originalité.

29- Il est laborieux, même il vit de son travail.

30- Il fait preuve de persévérance.

31- Il réalise ses passions de façon consciente et conséquente.

32- Il préfère, la plupart du temps, le travail en solitaire au travail en groupe.

33- Durant le travail, il peut avoir un sentiment de perte de la notion du temps.

34- Il vit des moments de dispersion de l’attention, le chaos semble régner à certaines périodes de l’activité, mais dans la majorité des cas, elle est finalisée par le fameux « eurêka » d’Archimède.

35- Il peut ressentir une fragilité émotionnelle élevée ou très élevée.

36- Il a des connaissances, du moins générales, dans le domaine dont il est question ; c’est dans ce contexte que l’on parle aussi de l’intelligence cristallisée (crystallized intelligence), donc de l’ensemble des savoirs accumulés grâce aux apprentissages et aux expériences1.

3. BARRIERES A LA CREATIVITE ET MOYENS DE REMEDIATION

37Dans les sections qui suivent, nous focaliserons notre attention sur les types de barrières à la créativité dans l’apprentissage des langues étrangères et la question de la remédiation. Quelques-uns des traits individuels semblent être particulièrement concernés, c’est pourquoi leur rôle sera soumis à une analyse plus approfondie – il s’agit des variables suivantes : estime de soi, anxiété langagière, intelligence(s), styles cognitifs, stratégies d’apprentissage, facteurs de la personnalité, croyances sur les langues et sur l’apprentissage des langues.

3.1. DEFINITION DE LA NOTION DE « BARRIERES »

38Le problème des barrières à la créativité dans l’apprentissage des langues étrangères semble fluide et donc difficilement saisissable, et même spécifier de manière exacte ce que recouvre le terme de « barrières » amène des difficultés. Ce serait l’une des raisons pour laquelle ce côté du thème de créativité est peu exploité dans la littérature du sujet.

39Grosso modo, si l’on parle des barrières, il est question de tous les facteurs à cause desquels un apprenant en langue ne peut pas faire usage de ses potentialités, aussi bien intellectuelles qu’affectives. Du coup, il n’obtient pas de résultats adéquats à ses compétences. D’un côté, les barrières peuvent être déclenchées par des facteurs externes, objectifs et indépendants d’un apprenant – l’autoritarisme d’un enseignant, le manque de cohérence entre les activités proposées par celui-ci et l’âge d’un apprenant, même le moment de la journée font partie de ce groupe. D’un autre côté, les barrières peuvent être provoquées par des facteurs internes, subjectifs, fixés dans les dispositions, émotionnelles par exemple, d’un apprenant. Lesdites barrières surgissent, même si les circonstances externes sont favorables à l’apprentissage, voire au fameux plaisir d’apprendre (Bielska, 2011 : 332-333)2. Flexibilité réduite quant à la pensée divergente, répertoire de stratégies d’apprentissage limité, versatilité d’intérêts, troubles d’estime de soi, anxiété langagière, etc. sont des exemples des blocages internes.

3.2. VERS UNE TYPOLOGIE DES BARRIERES

40Nous nous concentrerons sur les barrières subjectives dont la nature est très complexe et auxquelles il est quelquefois impossible de remédier – à notre avis, il faut aussi en prendre pleinement conscience ! Certes, les diverses barrières s’entremêlent, mais il est quand même possible de distinguer leurs types selon leurs spécificités et les moyens de remédiation.

3.2.1. BARRIERES AFFECTIVES

41Les barrières à caractère affectif constituent l’ensemble le plus volumineux. Ceci est lié à la nature même de l’apprentissage des langues étrangères, qui postule le développement des savoir-faire dont la qualité est largement influencée par les facteurs affectifs. « Je n’aime pas cette langue », « Je manque de motivation pour faire cet exercice », « J’ai peur d’improviser », « Je pars du principe qu’il est mieux de ne rien dire que de commettre une erreur », « Je ne veux pas me ridiculiser, c’est pourquoi je ne prends pas la parole pendant les cours » sont des phrases qui illustrent les blocages en question. Aux yeux de certains enseignants, de telles barrières sont attribuées aux facteurs et traits de la personnalité. Pourtant, nous ne devrions pas confondre les comportements résultant des facteurs de la personnalité et les états affectifs proprement dits – dans notre optique, les barrières affectives sont, dans la plupart des cas, plus temporaires et passagères, et elles sont occasionnées par des situations concrètes, même très ponctuelles. La distinction est d’ailleurs accentuée par Lubart dans l’interview menée par Aden et Piccardo (2009 : 17) : 

On prête une attention croissante aux aspects émotionnels impliqués dans la créativité, et typiquement on évoque d’une part les états émotionnels transitoires : on peut être de façon ponctuelle dans un état plutôt positif ou négatif, plus ou moins intense. D’autre part, nous évoquons également les caractéristiques stables sur le plan émotionnel, comme des traits émotionnels de personnalité.

42Les émotions et les sentiments négatifs entravent des comportements créatifs, surtout la capacité à raisonner, à prendre des décisions, à prendre des risques et à affronter l’imprévu et l’ambiguïté. Dans le même entretien, Lubart rappelle que la pensée divergente et l’ouverture à lincohérence sont renforcées par les états affectifs positifs (ibidem).

43Deux variables de nature affective se répercutent particulièrement sur l’acte créatif, à savoir l’estime de soi et l’anxiété langagière. Nous esquisserons leur impact ci-dessous.

44L’estime de soi (self-esteem) est considérée comme la variable affective qui détermine significativement l’apprentissage des langues étrangères, en particulier le type et le degré de motivation. Bien qu’elle soit composée d’éléments cognitifs et affectifs (confiance en ses compétences versus valeur accordée à soi-même) (Huteau, 2013 : 270-271), c’est le côté affectif qui joue le rôle décisif : les émotions et les sentiments négatifs étouffent les comportements créatifs d’un apprenant, car ils bloquent l’accès aux ressources cognitives. Quelles en sont les raisons ? Les apprenants ayant une basse estime d’eux-mêmes peuvent manifester une tendance vers la concentration sur leurs faiblesses et sur leurs échecs du passé, l’anticipation négative, le fatalisme, et juger les situations nouvelles comme menaçantes. De plus, une basse estime de soi résulte, entre autres, d’une basse autoconscience, tandis que celle-ci est une qualité inappréciable pour l’apprentissage : elle permet de définir ses objectifs ainsi que de choisir les moyens de les accomplir en fonction de ses besoins ou ses intérêts, et avant tout selon ses potentialités (André, Lelord, 2008 : 100-102 ; Smuk, 2012b : 83-85).

45L’anxiété langagière (language anxiety), définie par Horwitz, Horwitz et Cope (1986), est une autre variable susceptible de juguler considérablement la créativité. Ajoutons d’ailleurs que le niveau élevé d’anxiété langagière est fortement corrélé avec le niveau peu élevé d’estime de soi : « Dans un certain sens, l’anxiété et l’estime de soi sont les deux faces d’une même réalité affective, l’une empêchant l’apprentissage, l’autre le soutenant » (Arnold, 2006 : 415). Les auteurs du concept d’anxiété langagière en ont distingué trois composantes : anxiété communicative, anxiété sociale liée à l’évaluation de la part des autres, anxiété face aux tests ; l’impact des deux premières est le plus fort du point de vue du sujet en question. Leurs conséquences nocives sont décrites en abondance dans la littérature du sujet (p. ex. Horwitz, 2001), pour l’acte créatif, certaines passent pour les plus visibles – troubles de concentration, ralentissement des processus cognitifs (par exemple défauts du rappel des acquis antérieurs), incapacité à évaluer de manière pertinente la situation courante et ses compétences, difficultés à prendre des décisions, recours rapide aux mécanismes de défense : rationalisation, auto-handicap, évitement.  

3.2.2. BARRIERES COGNITIVES

46Les barrières cognitives constituent une autre catégorie de difficultés, quoiqu’il aille sans dire que le cognitif n’est pas séparable de l’affectif. Dans l’ensemble en question, il serait cependant nécessaire de distinguer les facteurs cognitifs attachés aux traits de la personnalité (types d’intelligence, styles cognitifs, etc.) des troubles cognitifs qui sont ancrés dans les mauvaises pratiques du passé (développement de la mémoire mécanique au détriment de la stimulation de la créativité, résolution de tous les problèmes langagiers par l’intermédiaire de la pensée convergente, etc.). « Je ne sais pas comment me mettre à la tâche », « Je ne prends pas garde à mes erreurs », « J’ai une mauvaise mémoire », « Je ne suis pas habitué(e) à organiser moi-même mon travail », « Je ne suis pas habitué(e) à quitter les sentiers battus dans l’exécution des tâches » sont des exemples de ces barrières.    

47Nous discuterons ci-dessous le rôle de l’intelligence – ou plutôt des intelligences – et des préférences cognitives.

48Huteau (2013: 99) remarque que « [...] l’intelligence est une condition nécessaire mais non suffisante de la créativité ». Pour le gros du public, l’intelligence est la variable la plus identifiée à la créativité. Mais l’intelligence n’est pas égale à celle-ci (Doron, Parot, 2011 : 171) et ladite correspondance n’est pas si évidente qu’il y paraît. La question de base est celle de définir l’intelligence et de dire quelle conception de l’intelligence est prise en considération – ceci est indispensable si l’on veut décortiquer les liens entre les comportements dits intelligents et les comportements qui témoignent de créativité. D’après nous, la perspective répondant à l’exigence du temps est celle qui valorise la coexistence de plusieurs intelligences. Ainsi, d’après Gardner (2001 : 390), il existe autant de créativités que de formes d’intelligences. La théorie des intelligences multiples (theory of multiple intelligences) en distingue huit types : verbale-linguistique, logique-mathématique, visuelle-spatiale, corporelle-kinesthésique, musicale-rythmique, naturaliste, interpersonnelle et intrapersonnelle. À chaque apprenant donc sa créativité à condition qu’il puisse agir conformément à ses potentialités ? C’est un des chemins à suivre. Nous ne pouvons pas non plus marginaliser le rôle de l’intelligence émotionnelle (emotional intelligence) définie par Salovey et Mayer (1990). Puisque l’intelligence émotionnelle est la capacité à maîtriser ses émotions et ses sentiments, ses déficiences enraient le déroulement des processus créatifs : elles empêchent l’orientation de ses pensées, elles entravent la concentration à long terme, elles freinent la rapidité, elles augmentent le niveau de stress et bloquent ainsi la mise en œuvre des processus témoignant d’originalité.

49La forme et le degré de créativité dépendent aussi des styles cognitifs (cognitive styles) préférés par un apprenant. Ceux-ci traduisent les tendances individuelles quant à la perception, la mémorisation et la résolution des problèmes, et se réfèrent à l’aspect qualitatif du travail (Huteau, 2013 : 120). Ils se caractérisent par une grande stabilité et leur évolution est très longue (Sagnier, 2013 : 146). Différents styles soutiennent plus ou moins les comportements créatifs. Pour l’illustrer, nous nous appuierons sur le modèle proposé par Cohen, Oxford et Chi (2002), qui mérite une attention particulière en raison de sa complexité ; effectivement, il concentre les variables appartenant à diverses typologies. Le questionnaire Learning Style Survey qu’ils ont conçu se compose de 110 questions regroupées en 11 parties, correspondant à 11 dimensions du fonctionnement cognitif : modalité préférée (visuelle, auditive, kinesthésique), extraversion versus introversion, traitement abstrait-intuitif versus traitement concret-séquentiel des données, ouverture à l’imprévu/à l’ambiguïté et tolérance aux dates limites, traitement global versus traitement particulier, traitement synthétique versus traitement analytique, concentration portée sur les différences versus les ressemblances, apprentissage des règles de grammaire de manière déductive versus inductive, dépendance versus indépendance à l’égard du champ, impulsivité versus réflexivité, manière métaphorique versus manière littérale du traitement des données. Certaines des caractéristiques données ci-dessus interrompent ou empêchent le déroulement normal des processus créatifs : incapacité à traiter les données de manière abstraite, intolérance à l’imprévu et à l’ambiguïté, difficultés à effectuer un raisonnement inductif, dépendance à l’égard du champ, réflexivité réduite, interprétation littérale de toutes les données langagières. Quant aux autres variables, il serait impossible, selon nous, de préciser le caractère des corrélations.

50Par contraste avec les styles cognitifs, les stratégies d’apprentissage (learning strategies) sont susceptibles d’être développées et modifiées, et sont déployées consciemment face à un problème donné. Utiliser un nombre modeste de stratégies diminue l’efficacité du travail. Ce qui détermine, par contre, les comportements créatifs, ce sont surtout l’étendue et l’originalité des stratégies cognitives exploitées ainsi que l’aptitude à se servir des stratégies métacognitives. Ces dernières permettent de comprendre les circonstances favorisant l’exécution d’une tâche donnée et de bien cibler les stratégies cognitives en fonction de la nature de celle-ci, ensuite, de les évaluer et d’apporter les modifications nécessaires. Eu égard aux liens entre la gestion des états affectifs et les résultats du travail, le rôle des stratégies affectives/socio-affectives3 est également à rappeler : elles permettent de réduire l’anxiété accompagnant l’exécution de la tâche.

3.2.3. « PSEUDO-BARRIERES » LIEES A LA PERSONNALITE

51Selon la typologie de la personnalité en cinq facteurs (Big Five), la personnalité humaine peut être décrite à l’aide des cinq « grands » facteurs dont les premières lettres forment le sigle OCEAN – il est question de l’ouverture d’esprit (ouverture à l’expérience), de la conscienciosité (caractère consciencieux), de l’extraversion/introversion, de l’agréabilité et du neuroticisme (névrosisme)/stabilité émotionnelle. Les facteurs de la personnalité et les traits leur correspondant donnent une orientation générale aux comportements. L’intensité de chacun de ces facteurs peut être présentée sur une échelle bipolaire.

52Deux facteurs de la personnalité – l’introversion et le neuroticisme – sont traités comme des barrières à l’apprentissage des langues étrangères. Partageant une telle opinion, erronée par à priori, nous pourrions admettre que tout facteur constitue, selon la situation, soit une entrave soit un atout ; par exemple, le niveau élevé de conscienciosité peut freiner les réactions spontanées, alors que les apprenants introvertis s’investissent dans une tâche donnée assidûment et pour longtemps – les qualités mentionnées sont très précieuses dans l’acte créatif (Smuk, 2012b : 83). Il faut garder à l’esprit ces deux types d’effets possibles, et nous nous proposons donc de qualifier certains comportements qui découlent des facteurs de la personnalité de « pseudo-barrières ». De plus, quelques déficiences éventuelles doivent être reconnues, car il n’est guère possible d’influencer les conduites résultant de telle ou telle personnalité parce qu’elles sont fortement ancrées dans les facteurs biologiques, déjà mentionnés dans la première section de l’article. Dans ce cas-là, il est fortement recommandé d’adapter les tâches aux potentialités « innées » d’un apprenant.

3.2.4. BARRIERES SOCIOPSYCHOLOGIQUES

53La dernière catégorie est faite des barrières que nous proposons de qualifier de sociopsychologiques. À notre avis, il est ici question d’un vaste ensemble de facteurs influencés, voire conditionnés par le milieu culturel et social du déroulement de l’enseignement/apprentissage des langues. Les composantes suivantes y seraient incluses : 

54-« la survalorisation » de certains comportements dans certains milieux sociaux et culturels, p. ex. « Sans être spontané(e), on ne peut pas apprendre à parler en langue étrangère » ;

55-les clichés portant sur le degré de difficulté de telle ou telle langue, p. ex. « L’espagnol est beaucoup plus difficile que l’italien » ;

56-les croyances erronées sur la spécificité de l’apprentissage des langues étrangères, p. ex. « La maîtrise du vocabulaire est l’aspect le plus important » ; 

57-les clichés portant sur le degré de difficulté de tel ou tel aspect de la langue, p. ex. « Apprendre le vocabulaire est plus facile qu’apprendre la grammaire ».

58Toutes sortes de représentations socialement partagées, y compris les idées reçues et les stéréotypes, subissent l’internalisation, définie comme « [...] assimilation par l’individu de données extérieures comme faisant partie de lui-même ou émanant de lui-même » (Doron, Parot, 2011 : 395). La motivation d’un apprenant est sérieusement affectée, si ces représentations se caractérisent par l’absence d’éléments constructifs.

3.3. COMMENT REMEDIER AUX BARRIERES ? EXEMPLES DE MOYENS ET DE TECHNIQUES DE REMEDIATION

59Dans cette section seront discutées quelques recommandations et activités visant à éliminer certains blocages ou à réduire leurs effets. Les solutions proposées ci-dessous s’appliquent surtout au contexte de l’enseignement aux jeunes adultes (étudiants) et aux adultes, et ont été soumises à l’épreuve pendant les cours de français pratique, auprès d’étudiants de l’Institut d’Études Romanes de l’Université de Varsovie. L’Institut fait partie de la Faculté de Langues Modernes et accueille actuellement presque 400 étudiants en licence et en master. Tous les étudiants, futurs philologues romans, suivent des cours obligatoires de français, répartis en quelques modules – expression orale, expression écrite, compétences intégrées, grammaire appliquée, phonétique appliquée – ainsi qu’en quelques volets thématiques, tels que « Langue des affaires », « France contemporaine », « Actualités françaises et francophones », « Traduction », « Discours académique ». Au total, les étudiants du premier cycle réalisent de 720 à 1185 heures de français (selon le niveau), tandis que les étudiants en master – 180 heures. Après les études de licence, ils arrivent à un niveau C1, après celles de master – à un C2.   

60Étant donné la nature complexe des barrières discutées ci-dessus et la possibilité restreinte de modifier certaines conduites, il est risqué de proposer des solutions définitives et vérifiables dans toute circonstance. Cette remarque se rapporte avant tout aux barrières directement ancrées dans les facteurs de la personnalité – comme nous l’avons souligné, en raison de leur origine biologique, il n’est guère possible de les influencer. C’est aussi la raison pour laquelle il est inévitable d’accepter certaines « faiblesses » (par exemple une forte réactivité du système nerveux) ou, et ceci nous paraît une solution beaucoup plus pertinente, de rediriger l’attention sur les aptitudes propres à différents facteurs. Simultanément, afin de favoriser le développement des traits propices à la créativité, nous proposerions d’adapter les activités et les démarches aux potentialités d’un apprenant.

61Pour ce qui des barrières affectives, la remédiation consisterait principalement à supprimer les états émotionnels négatifs ou, du moins, à neutraliser leur impact négatif. On pourrait également le compenser par la stimulation des émotions et des sentiments positifs. Voici quelques recommandations adressées aux enseignants de langue dont le but est d’inciter les comportements créatifs :

62-cultiver la curiosité d’esprit d’un apprenant ainsi que susciter son ouverture au nouveau et – surtout – son sens du relativisme ;

63-accentuer l’intérêt porté au processus d’exécution d’une tâche donnée sans focaliser l’attention, dès le départ, sur son résultat (par exemple la préparation à l’examen final) ;

64-stimuler la motivation interne d’un apprenant en définissant les défis de manière pertinente, soit selon les potentialités d’un apprenant, la phase du cursus, le moment de la leçon, etc. ;

65-« lever la censure », d’après les termes d’Aznar (2009 : 27), c’est-à-dire encourager un apprenant à prendre des risques, à favoriser les libres associations et ne pas les juger ;

66-assurer une variabilité de tâches afin que chaque apprenant puisse faire preuve de ses potentialités ;

67-pour les mêmes raisons, veiller à différentes configurations personnelles dans les tâches collectives ;

68-éliminer la rivalité, soutenir la coopération ;

69-ne pas mettre à l’écart les techniques ludiques (jeux, consignes originales, simulations, concours et quiz) ;

70-encourager un apprenant à prendre l’initiative ;

71-stimuler la remise en question des idées reçues ;

72-éviter de donner des conseils directifs et des consignes qui imposent la façon d’exécuter une tâche (« Vous devez le faire de telle ou telle façon ») ;

73-stimuler le développement de l’intelligence émotionnelle d’un apprenant ;

74-ne jamais contester la peur d’un apprenant (« Vous ne pouvez pas craindre »), mais chercher ses sources ;

75-maintenir la sécurité ;

76-faire preuve de son ouverture d’esprit et être prêt(e) à accueillir les solutions (originales, non conventionnelles) données par un apprenant.

77Pour remédier aux barrières cognitives, il suffit quelquefois d’élargir l’éventail des stratégies d’apprentissage utilisées. Parallèlement, il est indispensable de mettre l’accent sur le développement des stratégies métacognitives, car celles-ci permettent de gérer les stratégies cognitives. Ces deux remèdes n’exemptent pas de l’obligation de prendre en considération les styles cognitifs propres à un apprenant. C’est avant tout en tenant compte de ses points forts que l’on peut devenir créatif. D’après nous, appliquer la perspective promue, entre autres, par la théorie des intelligences multiples de Gardner paraît à la fois pertinent et pratique.

78Certaines activités langagières sont très propices à l’enlèvement des blocages de nature affective et cognitive, et soutiennent les comportements créatifs. Nous avons sélectionné ci-dessous une dizaine d’activités « très accessibles » qui, malgré leur caractère peu conventionnel, peuvent être incorporées dans les cours traditionnels de langue étrangère à leurs différentes phases :

79-Trouvez le maximum d’utilisations possibles du mot .../de l’expression ...

80-Cherchez le lien qui unit les mots suivants : ... (activité conçue sur le modèle de l’activité type « Cherchez l’intrus »).

81-Énumérez tous les mots vous venant à l’esprit quand vous entendez ...

82-Sur une liste de 30 mots appartenant à des domaines disparates, essayez de distinguer trois-cinq champs thématiques et justifiez vos choix.

83-Faites un récit portant sur ... à partir des mots/dessins suivants : ...

84-En vous inspirant de La Disparition de Perec (1969)4, faites un récit en bannissant tous les mots comportant la lettre ...

85-Imaginez ce que les personnages suivants (...) pourraient dire à propos de ...

86-Présentez une règle grammaticale (un sujet, un vocabulaire thématique, etc.) de la manière la plus propice à la compréhension, à votre avis.

87-Préparez l’activité de récapitulation la plus originale possible (par exemple en rapport avec le dossier réalisé pendant les cours).

88-Construisez la phrase la plus longue possible portant sur ...

89-Pour chacune des phrases suivantes, trouvez au moins deux interprétations possibles : ...

90En ce qui concerne les barrières à caractère sociopsychologique, il est indispensable de commencer, dès le début des cours, par faire prendre conscience des croyances sur les langues et sur le processus de l’apprentissage des langues, et faire comprendre leurs conséquences. Plus précisément parlant, il nous semble précieux d’analyser les croyances partagées par les apprenants, de mettre en question leur validité, de discuter les origines possibles de certaines croyances et de construire un inventaire de constatations vraies se rapportant à l’apprentissage des langues étrangères. Dans l’annexe, nous proposons le Questionnaire des croyances sur l’apprentissage des langues étrangères, élaboré par nous-même, que l’on peut distribuer pendant un des premiers cours et dont les vingt questions abordent les stéréotypes les plus fréquents, concernant le rôle de facteurs affectifs, de la culture d’origine, de la personnalité, de l’estime de soi, du sexe, des styles cognitifs, de l’âge, des aptitudes spéciales, etc.

4. CONCLUSIONS

91Tout apprenant en langue peut être créatif, mais la forme et le degré de créativité  varieront selon l’individu. Les variables individuelles, soit les composantes du savoir-être, fortifient ou troublent les processus créatifs. À cause des barrières rencontrées, les apprenants, même ceux qui présentent un très bon niveau de compétences langagières et se montrent très créatifs en dehors de l’école, obtiennent des résultats au-dessous de leurs potentialités ou évitent les situations pouvant les menacer. Par conséquent, les solutions des problèmes qu’ils proposent ou leurs réponses aux questions se réduisent à la prolifération de schémas prévisibles et standard – une telle tactique est moins menaçante. Dans l’article, nous avons parlé des quatre types de barrières tout en étant conscient de leurs espaces communs. De plus, diverses barrières coexistent et même l’une peut être à l’origine de l’autre : une basse estime de soi diminue le sentiment d’autoefficacité, ce qui prédit une chute de la motivation, et celle-ci se reflète dans un moindre engagement dans le travail. La remédiation aux blocages ou, du moins, la neutralisation de leurs effets devraient être intégrées aux cours de langue et faire l’objet d’un entraînement systématique – les démarches accidentelles et ponctuelles ne suffisent pas. Heureusement que beaucoup de moyens de remédiation, y compris présentés dans cet article, sont à la portée de tous, mais à condition qu’une autoréflexion et une prise de conscience des origines des barrières fassent partie du processus didactique.  

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Annexes

ANNEXE

Questionnaire des croyances sur l’apprentissage des langues étrangères

Notes

1  En dressant le portrait d’un apprenant créatif, il est aussi intéressant de s’arrêter au livre de Gardner (2001) qui a tenté de retracer la genèse de la créativité en analysant sept psychobiographies : Albert Einstein, Thomas S. Eliot, Sigmund Freud, Mahatma Gandhi, Martha Graham, Pablo Picasso et Igor Stravinsky. En voici quelques caractéristiques tirées du livre qui complètent le portrait fait ci-dessus : enfance/adolescence passée un peu en dehors des grands centres urbains, confort matériel relativement aisé dans l’enfance/l’adolescence, relation assez difficile avec au moins un parent, vie dans un milieu attachant une grande importance à l’éducation, promouvant le travail ardu et ambitieux, ambiance plutôt rigide et conservatrice dans le milieu familial, attentes élevées envers l’enfant, méfiance à l’égard de « l’extravagance » éventuelle de ses violons d’Ingres et de ses passions, grande religiosité possible pendant un certain délai, abandon du milieu familial à l’étape de la maîtrise d’une discipline donnée en vue de rechercher des circonstances propices au développement de la passion, installation dans un centre urbain, apparition de nouveaux amis partageant les mêmes passions, découverte d’une idée (d’un problème) tout à fait nouvelle et originale, travail en solitaire, quête de solutions, souvent chaotique, sans repères et objectifs précis, phases de doutes, déprimes, voire états de dépression, succès spectaculaire, reconnaissance (besoin de reconnaissance), symptômes d’égocentrisme.

2  L’auteure polonaise, Bielska, à qui nous empruntons cette conception, présente sa typologie des barrières dites psychiques dans l’apprentissage des langues. Elle distingue les barrières cognitives, affectives, de personnalité, langagières et psychosociales. Quoique nos nomenclatures se superposent par endroits, le contenu de quelques ensembles diffère entièrement – par exemple le bas niveau d’estime de soi est considéré par l’auteure comme une barrière de personnalité, tandis que pour nous, le concept d’estime de soi ne correspond à aucun facteur de la personnalité. Les croyances sur l’apprentissage des langues appartiennent, selon elle, à l’ensemble des barrières cognitives, nous les considérons comme faisant partie des barrières sociopsychologiques.

3  Oxford (1990) a distingué dans son modèle Strategy Inventory for Language Learning les stratégies affectives et sociales, tandis que O’Malley et Chamot (1990) parlent des stratégies socio-affectives.

4  Le roman de 300 pages ne comporte pas une seule fois la lettre « e ».

Pour citer ce document

Par Maciej Smuk, «Barrières à la créativité dans l’apprentissage des langues étrangères et moyens de remédiation  », Revue du Centre Européen d'Etudes Slaves [En ligne], Numéro 6, La revue, mis à jour le : 31/01/2022, URL : https://etudesslaves.edel.univ-poitiers.fr:443/etudesslaves/index.php?id=1168.

Quelques mots à propos de :  Maciej Smuk

Maciej Smuk est docteur habilité en sciences humaines, spécialiste dans le domaine de la didactique des langues étrangères. Il est maître de conférences et directeur de l’Institut d’Études Romanes, faisant partie de la Faculté de Langues Modernes de l’Université de Varsovie (Pologne). Il assure des travaux dirigés et des séminaires dans le Département de Didactique des Langues Romanes. Ses intérêts se concentrent sur des problèmes psychologiques liés à l’enseignement/apprentissage des langues ét ...